L’explorateur sous-marin américain, Barry Clifford, a-t-il trouvé l’épave de la caravelle de Christophe Colomb, la Santa María, bateau mythique ayant atteint pour la première fois les îles Caraïbes en 1492 ?
L’archéologue semble être sûr de lui, et si sa découverte est avérée, elle serait bien évidemment majeure pour l’archéologie sous-marine et exceptionnelle d’un point de vue historique, cette caravelle faisant partie de l’expédition de l’amiral génois menée vers ce qui allait devenir le Nouveau Monde avec les caravelles « La Niña » et la « Pinta ».
Barry Clifford a déclaré à CNN, lundi 12 mai, qu’il a trouvé l’épave du bateau à l’endroit exact où Christophe Colomb avait mentionné avoir échoué, il y a plus de 500 ans. Le naufrage s’étant produit sur un récif en face de la côte nord d’Haïti entre 3 et 4,5 m de profondeur. Ce qui a conduit l’explorateur à penser que le bateau est la Santa Maria est, entre autres, un canon du XVe siècle qui a été retrouvé antérieurement à proximité du site. « C’est le mont Everest des naufrages pour moi », a-t-il expliqué en ajoutant « ce bateau a changé le cours de l’histoire humaine ».
Pour rappel, Christophe Colomb avait entrepris un voyage en pensant découvrir une nouvelle route conduisant vers la Chine et l’Inde sous l’égide de la couronne espagnole, c’est le 3 août 1492 que les trois caravelles partirent du port de Palos (Andalousie), un voyage qui prit très vite une tout autre tournure… Le 12 octobre, l’équipage aborda une île inconnue de l’archipel des Bahamas rebaptisée aussitôt île de San Salvador par Christophe Colomb.
C’est finalement au mois de décembre que la Santa Maria échoua accidentellement en face de la côte de l’île d’Haïti, des parties du bateau, qui mesurait environ 36 m de long, ont alors été utilisées par la garnison espagnole pour construire le Fort Navidad.
« Toute la topographie sous-marine, la géographie et les preuves archéologiques suggèrent fortement que ces restes correspondent au célèbre navire amiral de Christophe Colomb, la Santa Maria », a déclaré le principal chercheur sous-marin des États-Unis aujourd’hui âgé de 68 ans.
Il a, par ailleurs, ajouté « le gouvernement d’Haïti a été extrêmement utile, et dorénavant nous devons continuer à travailler avec lui pour mener à bien une excavation archéologique détaillée des restes du bateau ».
Les premières études ont été réalisées en 2003 et ont permis de situer la zone du naufrage, ces données ont été utilisées par Clifford qui a photographié l’épave d’un bateau submergé dans les Caraïbes. Les doutes étaient encore de rigueur, mais quelques années après ses premières expertises, l’explorateur est affirmatif, des recherches à l’aide de magnétomètres ont permis de confirmer son hypothèse :
« Nous avons informé le gouvernement haïtien de notre découverte, et nous espérons travailler avec eux et d’autres collègues haïtiens pour assurer la protection du lieu et le préserver. Ce sera une opportunité merveilleuse de travailler avec les autorités haïtiennes pour préserver les preuves et les artefacts du bateau qui a changé le monde », a-t-il déclaré.
Selon Clifford, remonter à la surface les restes du bateau va dépendre des fouilles et de l’état de conservation du bois, si tout se passe comme prévu, et bien sûr si l’origine du bateau est certifiée, l’épave pourrait être exposée dans un musée d’Haïti.
L’équipe de Barry Clifford a utilisé des détecteurs de métaux sophistiqués et des scanners pour étudier les restes de l’épave, le bateau affiche une taille similaire à la Santa María, et certaines pièces trouvées à proximité du bateau sont propres à celles confectionnées en Espagne au 15e siècle.
Les historiens ne pensent pas qu’il s’agisse du bateau qui a accosté l’île des Grandes Antilles en 1492
En France, Michel L’Hour, responsable du département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (Drassm), se montre très prudent et se réfute à valider cette découverte sans la moindre preuve scientifique « Dans l’état actuel du dossier, cette annonce est un non-événement. Tout le travail scientifique reste à faire ».
Des historiens experts dans les voyages de Christophe Colomb vers l’Amérique doutent également de la supposée découverte du bateau originel Santa Maria, car comme le consigne l’amiral en personne dans ses récits, il a été démantelé en 1492 et ses planches ont été utilisées pour bâtir le Fort Navidad.
Cette découverte dans les eaux haïtiennes a donc surpris les principaux experts espagnols sur Colomb réunis aux Canaries à l’occasion d’un colloque consacré aux navigateurs intitulé « Certezas y falsedades ». Le membre de la Real Academia de la Historia de España, Carlos Martínez Shaw, directeur d’une biographie reconnue sur l’amiral et la professeure d’histoire moderne de la a UNED, Marina Alfonso Mola, qui a consacré de nombreuses recherches au Découvreur, sont formels : « Il est possible que ce soit une Santa Maria, il est possible que ce soit un bateau de Christophe Colomb, mais ce n’est pas le navire de la Découverte ».
« Il y a de nombreuses Santa Marías. En fait Christophe Colomb a navigué sur une autre Santa María durant son quatrième voyage, et il y a eu des centaines de Santa Marías naviguant sur les eaux. Mais concernant la Santa María du premier voyage, il y a des documents qui attestent qu’elle a été démontée et que ses restes ont servi à la palissade du fort », a affirmé Marina Alfonso Mola.
La professeure défend sa position sans même avoir vu les éléments de cette découverte archéologique en affirmant que la documentation de cette époque est fiable, sans aucune manipulation possible, et qu’à ce titre, cela ne peut en aucun cas être la Santa Maria, propriété du navigateur espagnol Juan de la Cosa depuis laquelle Christophe Colomb a dirigé sa première expédition.
Le Fort Navidad, premier édifice espagnol du Nouveau Monde, était situé au nord de l’île d’Haïti, appelée par Christophe Colomb « Hispaniola » (Haiti et Saint-Domingue), aujourd’hui il n’en reste plus rien.