Le Mexique affronte sa pire sécheresse depuis 70 ans et les conséquences liées au phénomène

Le Mexique souffre actuellement de la pire sécheresse que le pays ait connue depuis 70 ans (la dernière sécheresse de cette ampleur remonte à 1941) causant la destruction de plusieurs milliers d’hectares de culture et la perte de milliers de têtes de bétail, une situation extrême qui menace également l’approvisionnement interne en nourriture.

L’absence de précipitations affecte environ 70 % du territoire mexicain soit 19 états sur 32 directement touchés par les effets ravageurs du manque de pluie (dans un pays qui compte 112 millions d’habitants), parmi les zones les plus touchées on retrouve Coahuila, San Luis Potosí, Sonora, Tamaulipas et Zacatecas, au nord du pays, qui subissent de plein fouet les conséquences dramatiques de cette sécheresse. A cette situation, s’ajoute la perspective d’un hiver plutôt froid et aride.

Le sous-secrétaire au Développement rural rattaché au secrétariat de l’Agriculture, Ignacio Rivera, a signalé que la situation « était particulièrement grave ». Les statistiques de précipitation confirment qu’il s’agit bien de l’un des épisodes les plus secs survenus ces 70 dernières années. Le Mexique possède une surface cultivable de 22 millions d’hectares, en 2010 on a enregistré 32,6 millions de têtes de bétail bovin. Rivera a expliqué que le pays comptait sur 8,1 millions d’hectares de cultures assurées par la Sagarpa (Secrétariat à l’Agriculture, à l’élevage et au développement rural, à la pêche et à l’alimentation) contre les catastrophes naturelles.

Durant l’année, des milliers d’hectares de culture ont été perdus et environ 450 000 têtes de bétail sont mortes par un manque de pâturage lié à l’aridité de la terre (des chiffres émis par la Confédération national paysanne ou Confederación Nacional Campesina qui regroupe 5 millions d’agriculteurs tandis que le Secrétariat à l’Agriculture, à l’élevage et au développement rural, à la pêche et à l’alimentation se contente de reporter 15 664 têtes de bétail décédées), de la même façon, les bassins de rétention d’eau habituellement remplis à cette saison atteignent à peine 30 à 40 % de leur capacité.

Par ailleurs, les prévisions météorologiques n’offrent guère des perspectives réjouissantes, car avec le retour du froid sur des terres déjà asséchées, le moindre coup de gel pourrait avoir des conséquences catastrophiques.

« C’est une situation préoccupante, d’autant plus préoccupante, que la saison des pluies est terminée… Nous devrons attendre jusqu’au mois de juin 2012 pour voir quel sera le niveau des précipitations », a déclaré Felipe Arreguín, sous-directeur technique de la Commission nationale pour l’eau ou Comisión Nacional del Agua (Conagua).

Sécheresse dans l’État du Durango

Dans l’État du nord de Durango, où un tiers de la population vit de l’agriculture et de l’élevage, les autorités prévoient des pertes importantes en grains, comme les haricots et le maïs qui constituent la base de l’alimentation des Mexicains. Cet État vulnérable compte déjà un taux de pauvreté de 49,4 % (contre 44,2 % au niveau national), une situation climatique qui ne fait que renforcer la vulnérabilité des plus démunis. Dans le milieu rural, plus de 26 millions de personnes sont confrontées à la pauvreté et à la malnutrition en particulier dans les États de Durango, Zacatecas, Chihuahua, Coahuila, Estado de México, Oaxaca et Guerrero qui se retrouvent particulièrement touchées par cette catastrophe naturelle.

Les communautés indigènes sont les premières affectées, parmi lesquelles la population de El Mezquital, une municipalité d’environ 30 000 habitants de l’État de Durango, où évoluent des natifs tepehuanos, huicholes, coras et mexicaneros. Selon les autorités locales, au moins 30 % des enfants présentent des signes de malnutrition, « des formes plus sérieuses que d’autres », a par ailleurs précisé Faustino Reyes, maire de la ville.

« C’est une tragédie, car il n’y a pratiquement pas de récolte. C’est une situation critique, car la récolte des haricots ne permet même pas l’auto-subsistance », a déclaré Jorge Herrera, gouverneur de l’État de Durango. Des chiffres officiels font mention d’une perte de la production de haricots estimée à 28 % pour cette année, une récupération à hauteur de 1,2 million de tonnes dépendra des futures conditions météorologiques.

Concernant le maïs (le Mexique se classe parmi les cinq plus grands exportateurs mondiaux), une chute de la production à hauteur de 20 millions de tonnes est attendue (au lieu d’une production préalablement estimée à 23 millions de tonnes) en raison des gelées de ce début d’année et de la sécheresse. Les autorités pensent que si la situation venait à perdurer, le pays serait obligé d’augmenter ses importations pour faire face à une diminution de la production locale. Selon Herrera, l’État de Durango devrait produire cette année à peine 20 % des 250 000 tonnes de maïs et haricots qui sont habituellement récoltées durant une année. Le Mexique importe traditionnellement des millions de tonnes de maïs jaune et autres grains destinés à l’alimentation animale, tandis que le maïs blanc produit à hauteur de 90% au Mexique est destiné à la consommation humaine et en partie aux exportations.Le Mexique produit en moyenne un peu plus d’un million de tonnes de haricots et importe environ 70 000 tonnes. Les spécialistes n’écartent pas la possibilité que cette sécheresse virulente puisse s’étendre à d’autres régions, plus précisément dans le centre du pays.

Pour le moment, les pronostics concernant les précipitations pour les trois prochains mois sont inférieurs de 30 % à la normale, a révélé le secrétaire à l’environnement Juan Rafael Elvira, qui chapeaute une série de programmes pour fournir de l’eau et de l’emploi aux régions les plus affectées.

Les autorités fédérales ont informé, par ailleurs, que la sécheresse affectait environ 2.5 millions de personnes qui manquent d’accès à l’eau potable. Le secrétariat au Développement social a déclaré que le manque d’eau affectait 1507 communautés réparties sur sept États. Alors que ces États subissent une absence de précipitations inquiétantes, d’autres souffrent d’un excès de pluies… Cruelle réalité.

Les populations concernées par le manque d’eau sont approvisionnées pour leur usage personnel, cette aide ne permet bien évidemment pas de ravitailler le bétail ou d’arroser les terres de culture. Le secrétaire au Développement social (Sedesol), Heriberto Félix Guerra a annoncé que des citernes de 10 000 litres (pour un total de 9 millions de litres distribués) ont été réparties parmi les zones les plus arides, une situation météorologique extrême que beaucoup imputent au changement climatique mondial.

(Aline Timbert)

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