Les pluies intenses enregistrées au Paraguay, et plus précisément dans la région occidentale du Chaco, ont fait 11 000 familles sinistrées et six victimes mortelles parmi lesquelles un bébé de trois mois. Des décès imputés à un manque d’assistance sanitaire (pas d’accès à l’eau potable ou encore à des services élémentaires, absence de nourriture), des chiffres donnés par le Secrétariat rattaché aux urgences nationales ou La Secretaría de Emergencia Nacional (SEN). Il s’agit de l’une des pires catastrophes naturelles enregistrées ces dix dernières années, de nombreuses communautés restent encore isolées par les inondations, beaucoup souffrent de pathologies gastro-intestinales. C’est pourquoi les autorités ont commencé à traiter l’eau avec des produits chimiques dans le but de la rendre potable.
Simultanément, un programme de vaccination d’urgence contre la diphtérie, le tétanos, et le pneumocoque a été lancé hier samedi 21 avril. Le directeur de la surveillance sanitaire du Paraguay, Iván Allende, a reporté que de nombreux cas de diarrhée et de morsures de serpent et piqûre d’insecte ont été répertoriés dans la région frappée de plein fouet par des précipitations diluviennes. Pour sa part, le vice-ministre de la Santé, Raquel Escobar, a prévenu que le risque d’apparition du choléra était envisagé avec sérieux ainsi que d’autres maladies infectieuses, raison pour laquelle l’état d’alerte sanitaire est déclaré depuis le 19 avril. En raison des fortes pluies qui s’abattent depuis plus de deux semaines, la zone de Remansito, district de la ville de Villa Hayes dans le Bajo Chaco, demeure sous les eaux, ce qui rend les tâches d’évacuation compliquées pour ne pas dire impossibles et nécessite l’intervention des équipes de secours, uniquement par voie aérienne, seul moyen de venir en aide aux populations isolées. Aux pluies intenses s’ajoute la construction de digues dans des fermes privées empêchant l’écoulement des eaux, les forces armées ont donc été priées d’intervenir pour dynamiter les murs en réponse à des ordonnances judiciaires.
« Pour le moment ce sont près de 11 000 familles qui sont directement touchées dans la zone du Chaco, pour la plupart sinistrées ou totalement coupées du monde. La majorité des populations concernées sont indigènes », a souligné le responsable de la SEN, Gladys Cardozo. Face a cette tragique situation, le gouvernement paraguayen a mobilisé des centaines de fonctionnaires et militaires dans la zone sinistrée avant de porter assistance aux communautés totalement démunies.
Dans la zone touchée par les intempéries, il existe de grandes propriétés d’élevage et industries laitières côtoyant des communautés rurales très pauvres, ces dernières vont devoir faire face à des pertes économiques considérables, une année qui s’avère aussi très compliquée puisque l’élevage est touché par une poussée de fièvre aphteuse ces derniers mois. » Dans le pire des cas, nous pensons perdre jusqu’à 25 000 têtes de bétail. C’est un moment vraiment difficile », a déclaré à l’agence Reuters le vice-président de l’association rurale du Paraguay, Eusebio Cardozo.
Le Paraguay compte sur un élevage d’environ 12 millions de têtes de bétail réparti sur l’ensemble du territoire national, avant qu’il ne soit confronté à un foyer de fièvre aphteuse, il comptait parmi les 10 plus grands exportateurs mondiaux de viande bovine. Les ventes à l’extérieur de viande ont chuté de 30 % lors du premier trimestre de 2012.
Le secteur laitier est aussi particulièrement affecté par les inondations, la production, destinée au marché local, a chuté du fait que les usines ne travaillent qu’à 40 % de leur capacité.
« Ce sont entre 90 000 et 100 000 litres de lait qui sont perdus par jour, parce qu’ils ne peuvent pas être traités, et cela fait 12 jours que cela continue, ce sont plus d’un million de litres de lait perdu« , a affirmé le représentant de la Fédération des coopératives de Production ou Federación de Cooperativas de Producción (FECOPROD), Gustav Sawatzkydijo Sawatzky.
Vendredi, les militaires ont évacué plus d’une centaine de familles bloquées par les inondations, aujourd’hui le risque épidémiologique préoccupe les autorités, elles s’ inquiètent de voir surgir une épidémie de choléra par le manque d’eau potable et le traitement inadapté des eaux usées. Ce sont pas moins de 1500 personnes qui ont dû être évacuées d’urgence en raison des pluies torrentielles qui s’abattent sur cette zone jugée inhospitalière du Chaco, un phénomène météorologique qui a engendré la crue du fleuve Pilcomayo. La zone de General Díaz, ainsi que les communautés indigènes de Cacique Zapo, sont les plus affectées par ces conditions exécrables, les personnes déplacées ont été installées dans un refuge de fortune mis en place par le Secrétariat aux urgences nationales. La chambre des sénateurs a approuvé une déclaration d’urgence qui vise à débloquer davantage de moyens pour venir en aide aux sinistrés. L’Argentine a déjà manifesté son soutien en apportant une aide via l’envoi d’une Commission de casques blancs (en 1993, l’Argentine lança l’initiative des casques blancs des Nations unies spécialisés dans l’aide humanitaire) chargée de coordonner l’aide humanitaire sur place. L’Ambassade du Chili, a remis le 21 avril des vivres, des couvertures, et des moustiquaires à la SEN pour faire face à l’urgence humanitaire.
Les inondations ont fait près de 40 000 sinistrés sur le territoire paraguayen, et c’est près de 2 250 938 hectares du Chaco, dont 9,37 % de la région occidentale, qui se trouvent actuellement sous les eaux (Estero Patiño et Bajo Chaco).
(Aline Timbert)