Colombie : La guérilla ELN va-t-elle suivre les traces des FARC en signant enfin la paix avec le gouvernement ?

colombie08022017

Le gouvernement de Colombie et le dernier groupe guérillero dans le pays sud-américain, l’ELN, commencent aujourd’hui mercredi 8 février, à huis-clos, des négociations en vue d’un accord de paix, les pourparlers se tiennent en Équateur. Alors que l’accord de paix signé en novembre avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) suscite enfin l’espoir, le président de la République, Manuel Santos, prix Nobel de la Paix 2016, cherche à négocier un accord similaire avec l’Armée de libération nationale (ELN) pour mettre fin à plus d’un demi-siècle de guerre interne.

« Cette table ronde avec l’ELN nous remplit d’optimisme. Les nouvelles générations et les victimes méritent de faire progresser le dialogue et de parvenir à une paix complète, » a tweeté le président Juan Manuel Santos.

« Ce ne sera pas un processus express, mais pas non plus des discussions sans fin, » a toutefois averti M.Santos qui quittera ses fonctions en août 2018.

Mardi après-midi, après trois années de contacts discrets et plusieurs mois de retard dans l’ouverture des négociations, les délégués du gouvernement et la guérilla ont officiellement instauré le dialogue de paix dans une hacienda jésuite située à la périphérie de Quito.

« Nous sommes à un tournant », a déclaré le négociateur en chef pour le gouvernement, Juan Camilo Restrepo, en évoquant l’opportunité de mettre définitivement fin aux guérillas, des représentants du Brésil, du Chili, de Cuba, de la Norvège et du Venezuela assistent au processus.

Les pourparlers, avec un programme en six points, vont commencer avec deux axes en même temps:  » les actions dynamiques et humanitaires » et « la participation de la société dans la construction de la paix ».

L’ELN a exhorté le gouvernement à assumer sa « responsabilité » dans le conflit interne qui a fait couler le sang en Colombie en impliquant la guérilla, les paramilitaires et les forces de l’État, laissant 260 000 morts, 60 000 disparus et 6,9 millions de déplacés.

Pour Frédéric Massé, politologue à l’Université El Externado de Bogotá, « la cérémonie invite un optimisme prudent, parce que, malgré le ton calme des déclarations, les deux parties restent fermes sur leurs positions », il a également précisé  » le processus va être compliqué parce que l’ELN a des revendications un peu plus fondamentalistes que les FARC […], veut des modifications beaucoup plus profondes de la société ».

L’opposition armée oeuvre depuis 1964, elle réunit à ce jour quelque 1 500 combattants et plusieurs milliers de miliciens, une tentative de pacification qui intervient au moment où les FARC rendent les armes après 4 années de négociations.

Malgré une simultanéité d’agenda, les deux parties insistent pour que les deux processus soient indépendants, car il s’agit de deux organisations différentes: l’ELN a une structure fédérée et possède une plus grande base sociale que les FARC dont la structure a été plus verticale, les FARC possédaient par ailleurs une plus grande capacité de faire feu.

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Le groupe armé ELN a été fondé en 1964 avec le but déclaré de lutter contre les inégalités dans la répartition des terres et des richesses en Colombie, s’inspire de la révolution cubaine de 1959.

Le chef de la délégation de l’ELN, Pablo Beltran, a déclaré que la phase publique des pourparlers de paix tendent de « développer une sortie politique au conflit » ajoutant « nous sommes encouragés par l’espoir du peuple de mettre fin au conflit et le soutien de la communauté internationale ».

Beltran a déclaré qu’ « en ce moment historique le principal objectif national est la poursuite de la paix ». Le chef des insurgés a souligné que la concrétisation de la paix tient « à la capacité de résoudre ce qui nous a séparés depuis des décennies » évoquant aussi « la volonté de chaque partie de changer ».

Selon un sondage publié mardi en Colombie, 61,2 % des interrogés « ne croient pas » dans les intentions de l’ELN de parvenir à un accord de paix.

Le secrétaire général de l’OEA, Luis Almagro, a déclaré dans un communiqué l’espoir que les délégations puissent s' »engager dans un dialogue ciblé, profitable et pluriel qui répond aux besoins des zones touchées par la violence. »

Lors de la cérémonie, le gouvernement colombien a soulevé la question épineuse de la détention de personnes par les guérilleros: « Je veux profiter de cette occasion pour inviter l’ELN à donner aujourd’hui la meilleure nouvelle qui soit aux Colombiens, à savoir leur renoncement public à l’enlèvement », a déclaré Restrepo précisant « sans cette décision de l’ELN, il sera très difficile d’avancer dans la construction d’accords ».

L’agenda des pourparlers avait été initialement prévu en octobre, mais avait été retardé par M.Santos réclamant avant toute chose la libération d’un ancien membre du Congrès pris en otage depuis avril, tandis que la guérilla réclamait la grâce de deux prisonniers. En février dernier, l’ELN a finalement libéré l’otage Odin Sanchez Montes de Oca, tandis que le gouvernement a rempli aux exigences de l’ELN avec la libération de Nixon Cobos et Leivis Valero.

Il est prévu que le cycle commencé aujourd’hui dure environ 40 jours, d’autres cycles sont prévus pour parvenir enfin à la paix, la participation de l’ELN à un dialogue avec le gouvernement est revendiquée par plusieurs secteurs de la société qui aspirent à une paix générale pour la Colombie après que le 24 novembre les FARC aient signé un accord de paix final avec l’exécutif.

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