Pérou : quand l’exploitation minière divise et pollue les Andes

L’exploitation minière dans les Andes péruviennes s’enracine profondément dans l’histoire de la région, remontant à la colonisation espagnole.

En effet, dès le XVIe siècle, les montagnes des Andes, riches en métaux précieux, devinrent un pilier de l’économie coloniale espagnole. Des sites célèbres, comme la mine de Potosí, illustrent à la fois l’exceptionnelle richesse extraite des Andes et la brutalité du système colonial qui a exploité les populations indigènes.

Aujourd’hui, bien que l’exploitation minière demeure cruciale pour l’économie nationale et mondiale, elle est au cœur de conflits sociaux, environnementaux et économiques, opposant souvent communautés locales et entreprises multinationales.

La cordillère des Andes en Amérique du Sud

Un contexte géographique et économique stratégique

Les Andes péruviennes hébergent d‘importants gisements de minerais, notamment de cuivre, d’or et d’argent.

Le Pérou est le deuxième producteur mondial de cuivre, un métal convoité indispensable à la transition énergétique mondiale. 

Les projets miniers tels que Las Bambas (Copper) ou Yanacocha (Gold) génèrent des milliards de dollars de revenus pour le pays. Cependant, ces revenus ne se traduisent pas toujours par des améliorations significatives pour les populations locales.

Les racines des conflits dans les Andes péruviennes

Les tensions autour de l’exploitation minière dans les Andes péruviennes trouvent leurs origines dans plusieurs facteurs.

L’impact environnemental de l’exploitation minière dans les Andes

La contamination des eaux par les métaux lourds apparaît, en toute logique, comme une préoccupation majeure. Par exemple, dans la région de Cerro de Pasco, les niveaux de plomb, manganèse et fer dépassent largement les limites autorisées, affectant la santé des populations andines.

De plus, la réduction du débit des rivières à proximité des mines (grandes consommatricres d’eau) compromet l’accès à l’eau potable. Or les communautés paysannes vivent intrinsèquement de l’agriculture et de l’élevage.

Inégalités économiques, des locaux qui ne bénéficient pas des retombées

Malgré les revenus générés par les mines, 40 % des Péruviens subissent la pauvreté. En fait, dans les Andes, elle atteint même des taux affolants dépassant 70 % ! En effet, les retombées économiques locales sont souvent restreintes en raison d’une redistribution inefficace des revenus miniers.

Par ailleurs, les emplois créés par les grandes mines sont peu nombreux et souvent l'apanage de travailleurs qualifiés, laissant les populations locales marginalisées et dépourvues.

Accaparement des terres indigènes sans consultation préalable

En fait, les droits miniers appartiennent souvent à des entreprises étrangères ou nationales, De leur côté, les communautés indigènes n’ont pas accès aux ressources sous leurs terres ancestrales.

Bien sûr ce décalge occasionne des conflits sur la propriété et l’utilisation des terres.

Manque de dialogue et répression des contestations

Autre point, les gouvernements successifs ont criminalisé les protestations anti-mines et ont souvent utilisé la violence pour réprimer les manifestations.

Par ailleurs, les autorités instaurent des « tables rondes » pour trouver des compromis, Cependant, ces entretiens sont décriées pour leur vacuité et leur incapacité à répondre aux revendications locales.

La reconnaissance des droits indigènes au niveau international

Le respect du principe du Consentement Libre, Préalable et Éclairé (CLPE), comme stipulé par la Convention 169 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), est une exigence cruciale pour garantir les droits des communautés autochtones dans le cadre des projets miniers.

En effet, ce principe repose sur le fait que les peuples indigènes possèdent le droit d’être consultés avant toute activité susceptible d’affecter leurs terres, leurs ressources ou leur mode de vie.

Dans cette optique, cette consultation doit être menée de manière libre, sans coercition ni manipulation et de façon préalable, c’est-à-dire avant le début des travaux ou des décisions irréversibles. Les populations doivent bénéficier d’un éclairage, c’est pourquoi une information complète sur les impacts sociaux, économiques et environnementaux du projet doit être fournie.

De plus, le CLPE se fonde également sur le droit des communautés à exprimer leur consentement ou leur refus selon leurs propres mécanismes coutumiers.

Son application dans les Andes péruviennes pourrait prévenir de nombreux conflits en assurant que les projets miniers soient développés de manière respectueuse et inclusive, tout en renforçant l'autodétermination des populations locales souvent marginalisées.

Éxemples d’exploitations minières dans les Andes au Pérou

Las Bambas

Las Bambas est l’une des plus grandes mines de cuivre du Pérou et un épicentre de tensions depuis 2015. Les communautés locales dénoncent la pollution des rivières, la destruction des terres agricoles et l’absence de bénéfices pour les populations affectées.

Les manifestations ont été durement réprimées par les forces de l’ordre, entraînant plusieurs décès.
Ce projet géant opéré par MMG (Chine) est un épicentre de conflits.

D’ailleurs, les communautés locales paralysent régulièrement les routes utilisées pour transporter le minerai. En fait, ils dénonçent le non-respect des accords sociaux par l’entreprise.

Or, ces blocages affectent gravement la production et soulignent le ressentiment envers une industrie perçue comme exploitante plutôt que partenaire.

Cerro de Pasco


Depuis plusieurs décennies la pollution due aux activités minières souille la région. Les impacts sur la santé incluent une augmentation édifiante des maladies chroniques et même une baisse du QI chez les enfants exposés aux métaux lourds.

Jeune enfant d’une communauté andine au Pérou

Malgré cela, les autorités et industriels apportent peu de solutions pour remédier à ces problèmes environnementaux.

« Les populations locales ont des niveaux alarmants de métaux toxiques dans leur sang, causant des maladies graves comme l’anémie, le cancer et des malformations congénitales. Leurs droits humains ne sont pas respectés par les entreprises ou le gouvernement. » (POY Latam)

Quellaveco (Moquegua) 

Ce projet de mine de cuivre à ciel ouvert suscite une opposition depuis sa conception. Concrétement, les agriculteurs locaux rejettent la déviation de la rivière Asana, essentielle pour l’irrigation agricole. En effet, ils redoutent une contamination irréversible des ressources hydriques.

La mobilisation s’est structurée autour d’associations locales comme Labor, qui collaborent avec des ONG internationales pour fournir des études techniques et organiser la résistance.

Tía María (Arequipa) 

Ce projet minier dans la vallée de Tambo est emblématique du conflit entre agriculture et industrie extractive. Les habitants ruraux redoutent que les explosions nécessaires à l’extraction polluent l’air et que le sulfate contenu dans le cuivre contamine le fleuve Tambo.

Ainsi, depuis 2003, le projet fait face à un rejet massif. D’ailleurs, des manifestations fréquentes et violentes ont conduit à plusieurs morts et blessés.

Montagne des sept couleurs (Cuzco) 

Ce site naturel emblématique a été menacé par un projet d’exploitation minière. Cependant, une forte mobilisation citoyenne a conduit à l’abandon du projet par une entreprise canadienne en 2024, marquant une victoire pour la préservation de l’environnement

Perspectives et solutions potentielles aux conflits miniers andins

Par conséquent, quelles seraient les pistes de réflexion pour réduire ces tensions et garantir un développement durable du secteur minier au Pérou ? 

En fait, plusieurs mesures s’imposent parmi lesquelles :

  • renforcement de la régulation environnementale ;
  • Imposition des normes strictes pour contrôler la pollution et restaurer les écosystèmes endommagés ;
  • Redistribution équitable des revenus ;
  • Répartition des bénéfices générés par l’exploitation minière (développement local das les secteurs de l’éducation, la santé, infrastructures) ;
  • Reconnaissance des droits ancestraux ;
  • Participation active des communautés indigènes à l’exploitation et à la gestion des ressources minières sur leurs terres ;
  • Création d’ un cadre transparent où toutes les parties (gouvernement, entreprises, communautés) négocient sur un pied d’égalité.

« Les mines ont contaminé nos rivières et tué nos champs. Nous sommes les gardiens de la terre, mais le gouvernement nous a vendus. Je suis vieille, mais je continuerai à me battre pour que nos enfants ne soient pas empoisonnés. » – Concepción Consechoke, grand-mère Aymara lors des protestations contre le projet Santa Ana

Que retenir des mouvements soociaux anti-miniers au Pérou ?

L'exploitation minière dans les Andes péruviennes est un miroir du passé colonial. Toutefois,  elle continue d'alimenter une économie mondiale avide de ressources tout en laissant derrière elle une empreinte sociale et environnementale lourde. 

Ainsi, bien que la demande mondiale en minerais stratégiques comme le cuivre augmente, elle doit impérativement être réformée pour devenir plus inclusive et respectueuse des droits humains et environnementaux. Selon la BCRP (Banque Centrale de Réserve), les conflits sociaux dans le secteur minier péruvien ont coûté au pays plus de 0,2 % de son PIB au cours des premiers mois de 2025.

Dès lors, le défi consiste à transformer ce secteur afin qu’il ne reproduise pas indéfiniment les injustices héritées du passé colonial.

Pour les populations vivant à proximité des sites miniers dans les Andes péruviennes, la réalité, au quotidien, se manifeste par une lutte constante pour préserver leur santé, leurs terres et leur mode de vie face aux effets destructeurs d’une industrie extractive souvent peu régulée.

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