Mexique : Une plate-forme cérémonielle aztèque découverte au Templo Mayor

Des archéologues de l’Institut National d’Anthropologie et d’Histoire mexicain ont trouvé, il y a quelques jours, au Templo Mayor (nom qui fait à la fois référence au site archéologique du centre historique de Mexico et au musée inauguré en 1987 dans le but de dévoiler les découvertes  de l’ancienne cité aztèque), une plate-forme circulaire précolombienne de 15 m de diamètre ornée de 19 têtes de serpent (le dieu quetzalcoatl dans la religion mexica).

La structure, selon les estimations des scientifiques, remonte au règne de l’empereur mexica (aztèque) Axayácatl (« Visage-d’Eau » qui régna entre 1469 et 1481), elle date de 1469 ou de 1470 après Jésus-Christ, et a été révélée sur la place Manuel Gamio où sont réalisées des fouilles qui doivent permettre un nouvel accès au Templo Mayor, des travaux qui doivent être achevés en mai 2012. La plate-forme rituelle se trouve dans ce qui fut l’enceinte sacrée de Tenochtitlán (ancienne capitale de l’empire aztèque), précisément face au Templo Mayor et dans l’axe où se trouvait le sanctuaire dédié au dieu Huitzilopochtli. Ce dieu tribal de la Guerre et du Soleil, protecteur de la civilisation aztèque, est en effet le seul à ne pas être représenté dans les civilisations méso-américaines antérieures ou contemporaines des Mexicas. Il constitue, avec Tlaloc (Dieu de la pluie et de l’eau), la divinité la plus importante du panthéon aztèque.

Alfonso de María y Campos

En raison de la présence de têtes de serpent qui ornent la plate-forme, et de blasons en pierres polies, il a été établi par les chercheurs qu’il s’agit d’un Cuauhxicalco,« une sorte d’autel cérémoniel en pierre destinée à des usages religieux ou publics » comme l’a précisé Alfonso de Maria y Campos, directeur à l’INAH durant la conférence de presse qui a suivi la découverte.

« C’est un espace où étaient menées des cérémonies publiques. Comme elles ne pouvaient avoir lieu au Templo Mayor, le prêtre officiait plus bas et cette structure lui permettait de s’adonner à ses activités religieuses », a-t-il précisé. Épaulé par l’archéologue Raúl Barrera, chef d’équipe du programme d’archéologie urbaine (PAU) et responsable de la découverte, le fonctionnaire Alfonso de Maria y Campos a déclaré qu’il s’agissait de l’un des principaux édifices associés aux Templo Mayor et qu’il représente, à ce titre, une découverte considérable, car il devrait permettre d’en savoir plus sur les rites religieux qui étaient pratiqués en ces lieux.

Ce Cuauhxicalco qui apparaît à l’heure actuelle comme l’une des découvertes les plus pertinentes de ces dernières années se situe face au temple de Huitzilopochtli, dieu de la Guerre, une structure préhispanique dont les murs sont ornés de différentes têtes de serpent. « Il s’agit d’une structure circulaire, telle une plate-forme. Nous ignorons encore la véritable hauteur qu’elle a pu avoir. Elle a été trouvée à 6 mètres en dessous du niveau du sol », toutefois Raúl Barerra concède que le revêtement en stuc est plutôt bien conservé.

Une autre partie de cette structure qui sera consolidée et pourra dès lors être présentée au public au moyen d’une « fenêtre archéologique », a été découverte par l’archéologue Leonardo López Luján aux abords de Las Ajaracas où a été trouvé le 2 octobre 2006 le monolithe de la déesse Tlaltecuhtli.

Tête de serpent

Raúl Barrera, qui se charge également des travaux de recherche sur le temple du dieu Ehecatl et celui de Calmécac dans la rue de Guatemala, a signalé que ce Cuauhxicalco était en lien direct avec le dieu Huitzilopochtli tant pour sa situation géographique que par la présence de deux pierres qui font référence au dieu de la guerre. Il s’agit tout d’abord d’une sculpture en forme de chimalli ou de bouclier, qui selon les codex préhispaniques, correspond à une arme défensive que Huitzilopochtli portait dans la main gauche. L’autre figure représente un Chalchihuitl, figure de forme circulaire décorée de différentes plumes où apparaissent également quelques volutes de fumée « il existe une relation entre Chalchihuitl et la représentation solaire étant donné qu’il propose des représentations de plumes et de fumée », a précisé Barrrera. Cela s’explique par le fait que le feu garde une relation étroite avec la guerre et par conséquent Huitzilopochtli.

Plan de Tenochtitlan

Le site se trouve dans le centre historique de la ville de Mexico dont les édifices coloniaux ont été construits par les conquérants espagnols sur les vestiges de la cité de Tenochtitlán. Raúl Barrera a rappelé que des rapports datant de 1500 faisaient mention que la plate-forme avait été utilisée lors d’une cérémonie durant laquelle un prêtre aztèque était descendu de la pyramide avec un serpent en papier afin de le brûler sur ladite plate-forme. Par ailleurs, des écrits de chroniqueurs espagnols comme ceux du père Bernardino de Sahagún  indiquent qu’il y avait cinq plates-formes similaires dans le complexe, l’une d’elles a été découverte il y a de nombreuses années, mais cette nouvelle plate-forme était plus éloignée, or cette enceinte rituelle située au pied de la pyramide revêt une grande importance. Certaines sources historiques prétendent que les dépouilles de hauts dignitaires auraient pu être ensevelies sous ces Cuauhxicalco.

En 1997, à l’aide d’un radar, les archéologues ont détecté un site très proche de celui qui vient d’être mis à jour, de possibles chambres souterraines qui pourraient contenir les restes de l’empereur Ahuizotl (qui domina l’empire entre 1486 et 1503) alors souverain, lorsque Christophe Colomb atteignit le Nouveau Monde. Des supputations qui doivent bien sûr être avérées scientifiquement…

La découverte de cette plate-forme rituelle relance bien évidemment la possibilité de trouver un tombeau royal « Ce serait une découverte très importante pour l’archéologie aztèque », a affirmé Michael Smith, archéologue à l’Arizona State University qui n’a pas participé à ces fouilles, « ce serait extrêmement important, car l’on obtiendrait des renseignements directs sur la royauté, l’inhumation et l’empire, des informations qu’il est difficile de trouver autrement. »

(Article rédigé par Aline Timbert)

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