Équateur : Et si dans le futur on pouvait se soigner grâce aux amphibiens ?

La biomédecine est une discipline scientifique médicale impliquant les principes biologiques naturels à une pratique clinique.  En Equateur, cette branche passionne les chercheurs. En effet, la richesse de la biodiversité au sein de ce pays d’Amérique du Sud offre des perspectives prometteuses pour le secteur de la santé.

Le centre de recherche Jambatu, lieu de tous les espoirs en termes de biomédecine

Au centre de recherche sur les amphibiens Jambatu, (situé à San Rafael dans la vallée de Quito), les scientifiques ont un objectif clair, découvrir les médicaments du futur pour soigner de nombreuses pathologies.

En effet, l’épiderme atypique des amphibiens pourrait bien dissimuler de potentiels traitements pour différentes maladies causées par :

  • des virus ;
  • des bactéries ;
  • et des champignons.

Ces animaux sont d’ailleurs considérés comme de véritables pharmacies vivantes.

Luis Coloma, directeur du Jambatu Center for Amphibian Research and Conservation, explique que les grenouilles ont un « épiderme unique ». En effet, pour se protéger des agents pathogènes présents dans leur environnement, les batraciens ont développé différentes molécules qui fonctionnent comme un bouclier protecteur (toxines, neuropeptides…).

Les peptides font partie de ces molécules formées par l’union de plusieurs acides aminés. Actuellement, ils sont analysés pour leur capacité à lutter contre les maladies.

Cruziohyla calcarifer, Equateur (Wikipédia, auteur Andrew Gray )

Carolina Proaño, directrice du Laboratoire de biologie moléculaire et de biochimie de l’Université amazonienne Ikiam, indique qu’un total de 94 nouveaux peptides ont été identifiés chez les trois espèces les plus étudiées :

  • Cruziohyla calcarifer ;
  • Agalychnis spurelli ;
  • Boana picturata.

Les amphibiens, leurs propriétés utilisées pour la médecine de demain

Carolina Proaño explique qu’en raison de leurs propriétés, ces peptides pourraient servir de structures clés pour le développement de nouveaux traitements contre des maladies telles que :

  • le VIH ;
  • l’hépatite C ;
  • la dengue ;
  • la grippe ;
  • ou encore le paludisme.

Il y a également un potentiel biomédical dans le traitement de l’hypertension, de l’insuffisance cardiaque congestive, de la maladie d’Alzheimer et du cancer. D’ailleurs, des recherches sont en cours sur la leucémie et le mélanome. Dans ce cas, les chercheurs ont observé que le peptide adhère à la membrane de la cellule maligne et provoque son apoptose sans attaquer les cellules saines.

Des amphibiens, en particulier des espèces endémiques des Andes en voie de disparition, suscitent l’intérêt des experts. Il s’agit donc de les protéger pour pouvoir mener à bien des recherches à long terme pouvant conduire à l’élaboration de biomédicaments. Les sécrétions de ces derniers pourraient bien offrir des solutions thérapeutiques dans les prochaines décennies (d’ici 20 à 30 ans).

Le directeur du centre Jambatu affirme que les grenouilles et les crapauds représentent un univers intarissable de connaissances :

« On dit généralement que les grenouilles sont des pharmacies ambulantes, elles possèdent de nombreuses ressources chimiques d’intérêt biomédical ».

Par exemple, certaines sécrétions de crapauds sont 40 fois plus puissantes que la morphine, sans effets secondaires. Toutefois, en raison de sa puissance, son application ne peut pas encore bénéficier à l’homme.

L’usage traditionnel des sécrétions d’amphibiens est une pratique courante parmi les natifs

Des pratiques non validées par le milieu médical, qui d’ailleurs n’écarte pas des risques potentiels sur la santé, sont déjà utilisées en Amérique du Sud par des communautés natives. Traditionnellement, les Katukinas, les Kaxinawa et les Ashaninka, parmi d’autres groupes indigènes du Brésil, utilisent les sécrétions du kambó lors des rituels pour stimuler le système immunitaire.

Des chamanes utilisent la substance hautement toxique de la Phyllomedusa bicolor, aussi appelée grenouille kambó pour se protéger des prédateurs. Surtout présent en Brésil, cet amphibien d’un vert éclatant peuple la forêt amazonienne et peut également être retrouvé en Bolivie, Guyane, Pérou, Venezuela et en Colombie.

L’Institut Butantan, laboratoire de biologie cellulaire, a mis en garde contre les risques du vaccin-crapaud, technique indigène qui promet de fournir de la force, de l’endurance, et même de guérir diverses maladies, dont le cancer et la dépression. Selon le professeur Carlos Jared, directeur du Butantan, il n’y a pas d’études qui confirment l’efficacité globale du poison de la grenouille Phyllomedusa bicolor.

Le commerce de son venin est donc interdit par l’ANVISA (Agence de surveillance sanitaire du Brésil) et l’utilisation à grande échelle constitue un risque environnemental, car sa capture aveugle peut causer son extinction.

La protection de la biodiversité, un élément essentiel pour la médecine de demain

Vous l’aurez compris, ce qui est naturel n’est pas synonyme d’absence de toxicité. Les scientifiques sont là pour extraire le meilleur de la Nature à coup de recherches méticuleuses et d’analyses poussées.

Par ailleurs, les spécialistes équatoriens espèrent que l’urgence sanitaire actuelle en raison de la Covid-19 permettra d’ouvrir les yeux sur les trésors dont regorge la nature, et d’éveiller les consciences sur la menace qui pèse sur la biodiversité.

Protéger les ressources naturelles, c’est aussi offrir des opportunités immenses à la recherche médicale afin que la biomédecine puisse découvrir les médicaments de demain.

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